Marco Venditto - Chef éclairagiste
Publié le 5 octobre 2022
QUELLE EST TA FONCTION ? COMMENT DÉCRIRAIS-TU TON TRAVAIL ?
En tant que chef éclairagiste, je suis responsable de l’équipe éclairage sur un plateau de tournage. La gestion et la vérification des besoins, tant au niveau des ressources humaines que techniques, sont mes tâches principales. J’ai énormément de choses à faire en préparation d’un tournage. Heureusement que les Best Boys ou Girls sont là pour m’appuyer en amont et en aval.
Je travaille en étroite collaboration avec le directeur photo, qui est, par ailleurs, mon supérieur direct. Une autre partie importante de mon travail consiste à traduire la vision artistique du trio créatif (directeur photo, réalisateur et direction artistique) en conceptions techniques. C’est à moi de m’adapter à leur style et de comprendre leurs besoins et les émotions qu’ils souhaitent laisser transparaitre à travers l’écran.
En gros, j’apporte mon grain de sel au niveau technique et aide le directeur photo à concrétiser ses idées tout en m’assurant que l’orientation qu’on prend pour y arriver rentre dans le budget et le délai fixé.
QUEL ASPECT DE TON TRAVAIL AIMES-TU LE PLUS ?
J’aime l’énergie qui se dégage des plateaux de tournage et les gens qu’on y retrouve. Je suis de nature bohème et je ne peux pas être confiné à la même place trop longtemps. J’ai déjà été col blanc et ce n’est vraiment pas pour moi.
Sans trop généraliser, dans un bureau, tes collègues ont plus ou moins le même profil et le même niveau d’éducation que toi. En revanche, sur un plateau, on rencontre tous les types de personnes. C’est un lieu qui rassemble des originaux et qui permet de tisser des liens entre différents milieux. On ne retrouve pas ça ailleurs.
QUEL EST, SELON TOI, LE PLUS BEAU PROJET SUR LEQUEL TU AS TRAVAILLÉ ?
Le tournage du film Camion de Rafaël Ouellet à Dégelis a été l'une des plus belles expériences de ma vie. Tous les membres de l’équipe étaient exceptionnels, et malgré le petit budget du film, on s’en est plutôt bien tiré.
C’est un film qui aborde des sujets difficiles et c’était tout un défi de dépeindre une tragédie et des émotions crues à l’écran. Toute l’équipe technique vivait dans une auberge, on passait donc des heures et des heures ensemble. C’est cette intimité qui a contribué à une collaboration fructueuse et a permis de créer des souvenirs mémorables autant sur le plateau qu’en dehors.
Pour moi, le côté humain prime sur les connaissances techniques. Je préfère largement travailler avec un technicien sympathique qui a un peu moins d’expérience que l’inverse…
AS-TU UNE ANECDOTE INSOLITE LIÉE À TON TRAVAIL À PARTAGER ?
Il y a parfois d’heureux hasards en éclairage. Par exemple, sur le plateau du film Wicker Park, nous étions en train de remplacer une lampe installée dans un camion-grue de 110 pieds. Alors que nous testions la nouvelle lampe avant de la remonter, j'entends derrière moi une voix s'exclamer « ne touchez à rien ! ». C'était le directeur photo qui trouvait que l'éclairage était parfait. Nous avons finalement laissé la grue clouée au sol. C'était assurément le trépied le plus cher de l'histoire du cinéma, mais comme toujours, c'est le résultat final qui compte...
QUEL AVENIR IMAGINES-TU POUR LA PROFESSION ?
La technologie en matière d’éclairage et de techniques de tournage est en plein essor. Je dirais même que c’est le nerf de la guerre du département !
Les lampes qu’on utilise de nos jours sont presque comme des ordinateurs. Les lampes DEL, comme les SkyPanel de ARRI, les tubes Astera, ont vraiment changé la donne et notre façon de travailler. Les équipements deviennent de plus en plus performants et polyvalents, et en plus, consomment moins. Les studios virtuels amènent aussi une nouvelle approche quant à la façon d’intégrer l'éclairage en audiovisuel. Nous n’avons pas le choix de nous adapter à ces technologies pour continuer dans ce merveilleux métier !
SELON TOI, QUELLE EST LA FORCE DE L’INDUSTRIE AUDIOVISUELLE AU QUÉBEC ?
On dit souvent que les techniciens québécois sont débrouillards et ingénieux. C’est vrai ! On est habitué à travailler avec un budget restreint et des ressources limitées. On fait beaucoup avec peu !
Nous avons accès à une panoplie de lampes et de méthodes pour contrôler l’éclairage. Cependant, dans certains cas où la rapidité est de mise, je peux me débrouiller avec une lampe de chevet et un bout de papier essuietout.
Les techniciens d’ici sont aussi connus pour être chaleureux. Non seulement on trouve des solutions astucieuses aux problèmes, mais on trouve aussi toujours le moyen d'avoir du fun sur le plateau !